Tout aura commencé quand Nicolas Degen , tailleur de pierre dans les Ardennes belge aura pris pour stagiaire un élève que j'avais en formation de sculpture. Nous avons très vite sympatisé car il partage avec moi la culture d'un métier resté encore traditionnel et il m'accorda bientôt sa confiance en m'offrant de réalisater la statue d'une Vierge au serpent pour l'église de Baudour en Belgique.
Les vestiges de l'ancienne statue étaient peu lisibles, mais je me permetais toutefois d'imaginer que la tête devait être inclinée délicatement et les mains croisées sur le coeur. Des oeuvres contemporaines- de la fin du XIXième siècle me confirmèrent d'ailleurs dans ce choix.
Dès que l'architecte a validé mes esquisses, j'entreprend de dégrossir le bloc de pierre de Savonnière, en commençant par le socle de style néogothique.
Pour dégrossir la statue, je procède comme d'habitude:
1: casser les angles à la "chasse"... on y voit tout de suite un peu plus clair!
2: trouver la silhouette générale, avec le puissant marteau pneumatique "col de cygne"
3: placer les principaux volumes
Un serpent aussi expressif que la Vierge sera délicate, il sera taillé au marteau pneumatique nettement plus petit, le FK 714
Si on ne pouvait deviner la position du bassin, des épaules et des jambes, les plis les réalistes, voire les plus élégant n'offriront jamais plus à la statue de ressembler à un sac... Il ne faut pas si méprendre: suggérer le corps n'est pas de l'érotisme, c'est rechercher la vérité qui va donner vie à l'oeuvre |
Cas rare où les cheveux de la Vierge ne sont pas cachés, même pas ceint d'une couronne. Un choix iconographique qui m'a ravi. Sculpter une telle chevelure est toujours un vrai plaisir!
Le 7 ème jour |
Au final, ce seront 7 jours que j'aurai mis pour sculpter la Vierge... Certains diront que c'est très long et qu'ils n'auraient jamais eu la patience, d'autres reconnaitront que c'est très rapide, même comparé à ce que les nouvelles technologies peuvent offrir aujourd'hui.
D'ailleurs, avant de me confier cette commande, mon client avait pris la peine de réfléchir à la faire réaliser par une machine. Certains se seront hâtés de lui prétendre que l'on ne pourrait plus faire autrement! Peut-être aurait-elle mis moins de temps encore, mais il a toutefois préféré que la statue soit taillée à la main. En faisant ce choix, il contribua à préservé un savoir faire unique, bien sûr, mais pas seulement...
Ce que la machine ne pouvait faire, outre la créativité, c'était de d'avoir des sentiments. Comment pourrait-on déposer quelques émotions que ce soit dans un matériau si on en possède pas soi-même? Cette sculpture est dépositaire du bonheur que j'ai eu de la réaliser, elle est chargée d'une part de mon âme.
Bien plus qu'une roche prenant la forme de la Vierge, c'est devenu une prière sculptée dans la pierre